Publié le 18 octobre 2022
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En quoi consiste ton mĂ©tier de chargĂ©e d’accompagnement DAHLIR dans les Quartiers Prioritaires de la ville Ă Bourg-en-Bresse ?Â
La partie principale de mon travail est l’accompagnement des habitants vivant au sein des Quartiers Prioritaires vers une reprise d’activité de loisirs.
Pour arriver Ă cela, il faut rĂ©ussir Ă toucher ces habitants et se faire connaĂ®tre. Cela nĂ©cessite un gros travail partenarial avec tous les acteurs de terrain du territoire, que cela soit dans le social, le mĂ©dico-social, le socio-professionnel, l’insertion professionnelle…Â
Il y a en plus un travail de mĂ©diation auprès des habitants. On doit aller vers eux, pour en finalitĂ© rĂ©aliser un accompagnement individuel vers une reprise d’activitĂ©s de loisirs.Â
On peut aussi ponctuellement construire des projets suite Ă des financements (contrats de ville, quartiers d’étĂ©…) pour mettre en place des activitĂ©s dans les quartiers ce qui permet de nous faire connaĂ®tre et de toucher diffĂ©rentes personnes.Â
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Qu’est-ce qui a poussĂ© le dĂ©veloppement de telles actions sur les QPV de Bourg-en-Bresse ?Â
Suite Ă un diagnostic de la Direction DĂ©partementale de la CohĂ©sion Sociale (devenu la Direction DĂ©partementale de l’Emploi, du Travail et des SolidaritĂ©s aujourd’hui), il est ressorti que dans les quartiers prioritaires, la pratique, notamment sportive, est faible. La part des habitants en QPV licenciĂ©s en club est très faible comparativement aux autres habitants de la ville. Les habitants n’ont soit pas connaissance soit n’osent pas s’inscrire. Selon leurs problĂ©matiques, ils ont besoin d’être accompagnĂ©s pour avoir une pratique plus importante. Le DAHLIR a Ă©tĂ© appelĂ© pour essayer de renforcer cette pratique, d’amener les gens vers une pratique rĂ©gulière en club.Â
Sur Bourg-en-Bresse, cela concernait surtout au dĂ©part les seniors et les femmes. Ils Ă©taient plus laissĂ©s de cĂ´tĂ© vis-Ă -vis de la pratique. Mais aujourd’hui, il ressort aussi d’autres besoins, notamment sur les jeunes, que l’on constate aussi en terrain.Â
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A quoi est due cette diffĂ©rence sur les QPV ?Â
Il y a un problème qui peut ĂŞtre culturel. Certains publics, notamment certaines femmes, n’ont pas l’habitude d’avoir une activitĂ© de loisir. Parfois, on ne leur a jamais demandĂ© ce qu’elles aimaient faire ou ce qu’elles avaient envie de faire. Culturellement parlant, faire du sport, ce n’est pas une prioritĂ© ou cela n’existe pas. Elles se rendent compte aujourd’hui que c’est accessible Ă tous et qu’elles peuvent pratiquer. Pour les jeunes filles aussi par exemple, il faut parfois convaincre les parents qu’elles peuvent faire du sport. Pour certaines, elles ne peuvent pratiquer seulement avec des filles.Â
Il peut aussi avoir un problème de langue. Je me rends compte que j’accompagne beaucoup de personnes, qui sont en France depuis longtemps, qui ne savent pas lire ou Ă©crire, et pour qui cela va ĂŞtre compliquĂ© de faire des recherches, mĂŞme si elles ont envie de faire du sport. Elles ne savent pas vers qui aller ou oĂą se tourner.Â
Il peut aussi avoir des problèmes financiers ou de motivation sur le long terme. Globalement, on ressent que le sport n’est pas une prioritĂ©. Pour les enfants, les parents vont mettre l’accent sur l’école. Il faut alors leur faire comprendre qu’ils ne peuvent pas Ă©tudier toute la journĂ©e, sans loisir. Pour les adultes, d’autres soucis seront aussi pris en compte en prioritĂ©. Alors que, justement, la pratique du sport leur permet d’être pendant une heure loin de ces soucis, et ils seront plus disponibles ensuite pour les rĂ©gler. Ils ne peuvent pas ĂŞtre en boucle sur leur recherche d’emploi ou autre. Cela peut ĂŞtre bĂ©nĂ©fique d’avoir un loisir. Cela oblige Ă sortir, Ă prendre du temps pour soi, Ă s’aĂ©rer l’esprit.Â
Comment le dispositif s’est mis en place Ă Bourg-en-Bresse ?Â
Après le diagnostic rĂ©alisĂ© par la DDCS, le DAHLIR a Ă©tĂ© sollicitĂ©. Son implantation a alors dĂ©butĂ© par des nombreuses rencontres partenariales, afin de se faire connaĂ®tre par les acteurs du territoire.Â
Depuis, je collabore beaucoup avec une mĂ©diatrice qui travaille pour la sauvegarde de l’enfance au niveau de l’accès aux droits pour les familles. On s’est tout de suite très bien entendues et elle me donne beaucoup d’orientations. Â
Je travaille aussi avec le Dispositif de RĂ©ussite Éducative et je suis assez sollicitĂ©e par les acteurs de l’insertion professionnelle, notamment par les Conseillers d’Insertion Professionnelle. Cela permet parfois aux bĂ©nĂ©ficiaires de passer par le sport avant d’arriver Ă l’emploi, mais aussi de remettre en mouvement certains personnes très Ă©loignĂ©s de la pratique avant d’envisager une reprise d’emploi.Â
Et je travaille beaucoup avec les centres sociaux et avec Campus Tremplin pour les rĂ©fugiĂ©s.Â
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Comment le dispositif fonctionne concrètement ?Â
Sur Bourg-en-Bresse, il y a deux leviers principaux.Â
Nous recevons des orientations issues de partenaires. Nous allons alors rĂ©aliser un entretien individuel avec la personne et ensuite faire des recherches d’accompagnement. C’est la mĂ©thode classique du DAHLIR.Â
Mais je vais aussi sur le terrain. Je participe par exemple à toutes les fêtes de quartiers. J’essaye d’être présente sur les différents événements, sportifs par exemple, qui se passe dans le quartier.
Sur le terrain, on s’organise aussi avec les autres acteurs (animateurs des centres sociaux, autres mĂ©diateurs…). On Ă©change pour aller dans les quartiers ensemble, car c’est plus productif d’être Ă plusieurs pour aller au contact des gens. On met aussi en place des actions communes, comme des sĂ©ances d’activitĂ© physiques, des actions autour d’Octobre Rose par exemple…Â
Dans ce cadre, je vais aussi Ă la rencontre des mamans Ă la sortie d’école dans les quartiers, ou aux CafĂ© Habitant organisĂ© par les centres sociaux. Il est important d’aller au contact des gens et de se faire connaĂ®tre.Â
Mais nos actions dĂ©pendent vraiment du fonctionnement du quartier, des partenaires et de la typologie du quartier. J’interviens dans 3 QPV sur Bourg et cela reprĂ©sente une superficie assez importante, c’est Ă prendre en compte dans notre façon de fonctionner.Â
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As-tu des exemples de rĂ©ussite de tes actions, de tes accompagnements ?Â
J’ai plusieurs exemples, mais je peux par exemple citer l’accompagnement de deux dames que je rĂ©alise depuis 1 an et demi maintenant, presque depuis mon arrivĂ©e.Â
J’ai pu les accompagner Ă travers le projet “Couture et Culture” d’abord, projet dans lequel les participants devaient coudre pour une exposition culturelle. Ensuite, nous avons enchaĂ®nĂ© avec un autre projet couture, cette fois en association avec une compagnie de théâtre.Â
Suite Ă cela, elles ont voulu poursuivre, et d’autres bĂ©nĂ©ficiaires voulaient continuer d’apprendre. Pour rĂ©pondre Ă ces envies, ce sont ces deux dames qui ont crĂ©Ă© et qui animent un atelier couture pour dĂ©butantes. Je ne les ai pas accompagnĂ©s vers une structure ou une activitĂ©, ce sont elles qui l’ont dĂ©veloppĂ© ! Elles organisent un atelier tous les vendredis matin, bĂ©nĂ©volement. J’accompagne maintenant des personnes vers celui-ci. Â
De plus, pour l’une d’entre elles, qui Ă©tait très renfermĂ©e au dĂ©but, cela lui a permis de s’ouvrir et d’avoir dĂ©sormais de nouvelles envies, de pratiquer une activitĂ© physique par exemple. Elle se sent prĂŞte Ă sortir de sa zone de confort.Â
Les bĂ©nĂ©fices de nos actions vont donc plus loin que juste la pratique, mais se retrouve dans l’ouverture et dans la sociabilisation… Cela permet Ă des personnes d’avoir parfois un nouveau dĂ©part.Â
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Quelles difficultés rencontres-tu dans tes accompagnements ?
La seule difficulté à laquelle on est confronté est le manque de places dans les clubs. Ce manque de places peut fermer des portes aux personnes que l’on accompagne.
Il y a donc encore un gros travail Ă faire avec les clubs, pour qu’ils nous connaissent, qu’ils aient confiance, et pour qu’il y est une meilleure intĂ©gration de tous. Mais avec le temps, cela finit par payer. Petit Ă petit, certains clubs deviennent des acteurs et s’adaptent, proposent mĂŞme des choses pour aider les personnes en difficultĂ©.Â
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Selon toi, qu’est-ce qui fait la rĂ©ussite du DAHLIR sur les QPV ?Â
Il y a un rĂ©el besoin auquel le DAHLIR rĂ©pond. Mais pour que cela fonctionne, il faut vraiment qu’il y ait une confiance mutuelle entre le DAHLIR, les bĂ©nĂ©ficiaires et les partenaires. Â
C’est pour cela que l’on souhaite rencontrer le maximum de partenaires dès le dĂ©but, et que l’on essaye d’établir une relation de confiance sur le long terme.Â
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Que pourrais-tu souhaiter au DAHLIR pour ses 10 ans ?Â
Je souhaite que cela perdure, pour les gens que l’on accompagne. Mais en mĂŞme temps c’est ambivalent, car cela veut dire qu’il y a beaucoup de besoins, de manques…Â
Mais je souhaite que cela se dĂ©veloppe et que l’on aide le plus de gens possible. Et que l’on puisse manger du gâteau d’anniversaire dans 10 ans !Â
Propos recueillis par Pierre Boccon